Guess who's back - Edgar & Arthur

L’américain en question plissa les yeux en l’entendant dire que lui non plus ne s’y attendait pas. Il se souvenait de beaucoup de choses d’un coup, de cette tempête, de quand il lui avait prêté des affaires et même donné une veste à l’époque car il n’avait pas grand-chose sur lui. Edgar avait envie de sourire, ce n’étaient pas de mauvais souvenirs, mais il pensait sur le moment que ça aurait été des adieux et non un au revoir. Au fond de lui, ça le rendait heureux, dont ce sourire qui venait de se dessiner seul sur son visage, il était chaleureux, et aucune pitié ne se dégageait des yeux de l’écrivain.

« Je suis heureux de te retrouver Arthur. » Des mots qui ne voulaient pas s’échapper de ses lèvres, mais qui resta bien dans sa conscience, il ne voulait pas le lui dire. Il ne savait pas pourquoi, peut-être qu’il ne voulait pas le brusquer, ou ne pas le revoir pleurer, car ce qu’il avait vu cinq minutes plus tôt n’était pas un spectacle qu’il aimerait voir de nouveau, au contraire, alors il allait changer de sujet lui aussi, rentrant dans celui de l’écriture. Il reprit rapidement son sérieux cependant, il ne souriait plus, et repoussa sa tasse un peu plus loin, de toute façon c’était froid et prenait trop de place sur la table à son goût.

- Peut-être certains oui, je t’en donnerais des exemplaires, mais la plupart du temps je préfère les faire lire à mon entourage avant. Afin d’avoir leur avis sur la chose et sur des erreurs que j’aurais pu commettre.

Il était toujours un peu gêné et à la fois pressé de savoir l’avis des personnes qui jugeaient ses écrits. Comme si c’était quelque chose de précieux pour lui.. Et c’était le cas. Il fut par la même occasion très intéressé par ce qu’était en train d’écrire Arthur, il voulait absolument lire ça, et les compliments qu’il lui avait fait auparavant sur le fait qu’il l’avait inspiré lui donnait encore plus de motivation.

- Je le serais, ne t’en fais pas.

Dit-il en prenant délicatement le bloc-notes dans ses mains, observant l’écriture d’Arthur qui était sans doute très belle et appliquée. Il l’ouvrit et c’est à ce moment qu’il commença à se plonger dans les brouillons du récit du jeune homme. Il s’était vraiment appliqué il n’y a pas à dire, et même pour des brouillons, il n’y avait aucune faute, pas vraiment grand-chose à dire à part qu’il était très bien son récit, mais il y a un petit détail.

- Je le trouve très bien Arthur, les informations sont cohérentes, de plus la manière dont tu décris les actions sont détaillées, cependant, je te dirais que les sentiments de ton personnage principal ne sont pas assez mis en avant, ou du moins on a du mal à cerner ce qu’il pense vraiment. Sauf si c’est fait exprès, et ça serait très intelligent de ta part pour le coup. Tu vois les lecteurs essayent toujours de s’identifier au personnage principal, et vu que tu omets un peu ces sentiments, le lecteur va mettre les siens à sa place. En gros pour faire simple, quand un personnage est trop « caractériel » les lecteurs vont se dire que cela ne leur ressemble pas assez et vont vite se détacher du récit… Après ce n’est que mon avis personnel, tu en fais ce que tu veux.

Lui fit-il en lui redonnant ces précieux écrits. Il était certain qu’Arthur était doué dans l’écriture, mais ce qui y manquait était les sentiments, sans aucun doute. Il venait de tout dire à Arthur, il voulait le conseiller pour que lui aussi y arrive, et il ne le ferait pas pour n’importe qui.

Edgar avait toujours pensé que lire les récits de quelqu’un pouvait laisser transparaître sa personnalité, sa façon de penser sur des sujets divers et variés. Par exemple l’écrivain avait tendance à beaucoup critiquer la société et les valeurs qu’il considérait comme immorales pour leur époque. C’était triste de voir qu’elles n’évoluaient pas malgré le temps qui passait. Arthur lui, venait de confirmer que le narrateur devrait un peu plus laisse transparaitre ses émotions, ce qui en effet, correspondait à lui-même. Il avait toujours pensé qu’Arthur était quelqu’un qui ne montrait pas forcément les émotions et était une personne qui préférait accumuler plutôt que de s’exprimer. Après peut-être se trompait-il. Sûrement pour ça qu’il ne fit pas de commentaire sur le narrateur et qu’il s’était contenté de laisser place à un léger sourire et réfléchir à sa question.

- Un nom Irlandais ? Sherrinford fait plus britannique en effet, donc.. Peut-être quelque chose comme.. Shardock ? Surtout si tu veux que ça sorte du lot. Après ce n’est peut-être pas le plus beau nom mais je te propose juste.

Au final il avait fait recommander du thé, que ce soit lui ou pour Arthur, car il se doutait que si le sien était froid, celui-ci n’allait guère apprécier que le sien le soit également. Quelqu’un venu donc leur reprendre leurs tasses, et ce que dit son interlocuteur par rapport au fait d’être content de le revoir, Edgar le pensait exactement au même moment, et ne pu contenir le rouge qui lui montait aux joues, bafouillant presque sous la surprise tandis qu’il l’avait regardé dans les yeux, un œil de l’écrivain enfin à découvert, laissant apercevoir ses cernes apparentes.

- J-je suis… Heureux et content de te revoir aussi.. Enfin ça veut dire la même c-chose mais.. Voilà. Je pense que ça faisait bien trop … longtemps.

Son regard avait fui, non pas parce qu’il mentait, mais il avait peur que tout ce qu’il avait pu ressentir et garder en lui, les sentiments pour Arthur ne refassent surface, ce qui serait bien trop encombrant et gênant pour le britannique qui ne voudrait sûrement pas de ce genre de choses venant de quelqu’un qu’il avait vu il y a de cela environ dix ans et qu’il connaissait à peine. Il changea rapidement de sujet, pour ne pas y repenser, même si ce n’était pas complètement hors sujet.

- On dirait que Karl ne t’a pas oublié.. Il a directement reconnu ton odeur et relevé la tête quand il t’avait vu arriver. Ah et il a beaucoup grandi et grossi aussi, il ne fait que de manger son estomac est sans aucun doute un trou noir.